Le temps des idéologies est révolu

A quelques semaines de l’élection présidentielle, un constat s’impose : les partis en présence semblent tous dénués de philosophie politique autour de laquelle fédérer en masse militants et sympathisants. Pis ! Tous semblent orphelins de leurs idéologies mères marquant ainsi la fin de modèles de pensées longtemps dominants.

Alors que une grande majorité des candidats à l’élection présidentielle s’est déclarée, sauf le président sortant qui aime à reculer l’instant certainement à des fins tactiques et politiques, il apparaît donc que tous les ingrédients rythmant le rendez-vous électoral phare de la Cinquième République soient réunis. Programmes, discours, réunions politiques, militants…Bref ! Tout y est ! Pourtant, à qui s’intéresse à la chose politique, il manque, et ce peut-être depuis plusieurs décennies désormais, un élément clef : des idéologies. Tant à droite qu’à gauche, et que dire du centre qui s’est toujours revendiqué centre de gravité sans jamais trouver le sien, comprenez sans jamais trouver sa véritable philosophie politique, il fait aujourd’hui cruellement défaut aux partis politiques contemporains français une colonne vertébrale propre à chacun autour de laquelle se structureraient des programmes fois réalistes et ambitieux, empreints de chronicité et d’avenir. Est-ce à dire que les idéologies sont mortes, en politique tout du moins ? L’idée n’est pas nécessairement saugrenue et tendrait à être confirmée dans les faits après un rapide tour d’horizon de la situation qui peut très aisément s’étendre à d’autres pays européens voire au-delà. (liberation.fr : https://www.liberation.fr/week-end)

Pourfendeur d’inégalités et libéralisme soumis

La gauche, soutenue par la pensée marxiste qui a longtemps servi d’axe de rotation aux partis progressistes de la seconde moitié du XIXème siècle jusqu’aux premières heures du XXIème, voit sa boîte à idées neuves tristement vide. Pourfendeurs des inégalités sociales, porteurs des revendications sociales à même de transformer la société, la gauche française s’est peu à peu éloignée d’une classe ouvrière déjà en déshérence depuis les années soixante-dix en se transformant en parti social-démocrate sans en assumer le nom et, en plus, en manquant cette mutation qui aurait pu la sauver. Incapable de proposer des solutions sociales empreintes d’humanisme et de pragmatisme face à la mondialisation, la gauche française s’est enfoncée dans le marasme propre aux mouvements dans l’incapacité de se transformer car plus préoccupée par son avenir que par sa vocation initiale alors que là était sa survie. (lemonde.fr : https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/07/) A droite, le libéralisme transmit par héritage et habiles mutations intellectuelle depuis la Révolution française, a cédé le pas à un capitalisme financier et boursier sauvage que la crise de 2008 a mis en évidence. Là encore incapable, tout comme à gauche, de transformer son discours pour réhabiliter l’idée de liberté d’entreprendre sans sombrer dans ce capitalisme destructeur et porteur d’inégalités devenues criantes, la droite s’est laissée subjuguer par l’extrême-droite, sophiste et populiste, tout en la combattant, trouvant là une occasion d’exister. Vaincue par elle-même, c’est-à-dire par les dérives d’une idéologie dont elle n’a pas su deviner les limites ou les dangers, la droite française, dite républicaine, nouvel attribut sensée la rendre plus fréquentable, passe le plus clair de son temps à légitimer sa présence en expliquant qu’elle n’a rien à voir avec l’extrême-droite tout en empruntant des thèmes espérant elle aussi ainsi assurer son avenir.

Chambre d’enregistrement et modèles

Or, si le combat n’est pas vain, loin s’en faut, il doit aussi s’accompagner d’autres discours à même de réhabiliter l’esprit libéral dont elle se prévalait. Quand au centre, si tant est que celui-ci ait un jour existé, qui prétend opérer la synthèse entre les meilleures avancées de ses deux rivaux, il se révèle in fine n’être qu’une chambre d’enregistrement camouflée sous les oripeaux d’un parti politique sans jamais avoir été mu par une quelconque idéologie. Or, reste à dater l’érosion des idéologies, érosion qui pourrait débuter au milieu des années soixante-dix, quand les économies occidentales se retrouvaient dans l’impasse d’un chômage de masse et de déficits publics croissants, impossibles à résorber via l’application des théories libérales ou keynésiennes classiques. La chute du Mur de Berlin, la crise de 2008, les attentats du 11 septembre sont autant d’éléments marquant qui symbolisent aussi par les conséquences engendrées la fin de modèles portés ou inspirateurs d’idéologies aptes à structurer le monde et les sociétés contemporaines. Alors affirmer que le temps des idéologies a vécu peut apparaître comme radical, voire manichéen, car d’autres prendront certainement leur place. Mais pour l’heure, soit celles-ci tardent à se dessiner soit elle sont encore en gestation.

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