Poussée à se retirer du télé-crochet The Voice, Mennel incarne une catégorie d’individus, jeune et baignée d’insouciance, prompte à s’exprimer sur internet mais oublieuse de la notion de conséquence et de responsabilité. Sauf qu’Internet n’oublie pas.
Que retenir in fine de l’affaire Mennel ? Que TF1, chaîne consensuelle s’il en est, a voulu étouffer tout commentaire susceptible de nourrir de quelconques polémiques qui auraient attenté à l’un de ses programmes phares, ici The Voice. (Lire l’article sur : lexpress.fr : Messages complotistes: face à la polémique, Mennel quitte The Voice) Certes à ce jour l’affaire est close. Pourtant en y regardant de plus près, si cette affaire, en particulier, est derrière nous, d’autres en revanche pourraient dans les semaines, les mois ou les années à venir littéralement exploser. Comment ? Et bien tant que celles et ceux qui se rendent sur les réseaux sociaux continueront à s’exprimer sans réfléchir aux conséquences de leurs propos, les affaires Mennel ne cesseront d’émerger. Tant que les utilisateurs de Facebook, Tweeter ou autres s’exprimeront en toute insouciance sans la moindre notion du poids de leurs contributions, alors les archéologues du web, (ceux qui, patiemment et méthodiquement, écument les pages à la recherche du mot, de la phrase ou du commentaire jugé maladroit, pire xénophobe, homophobe, raciste ou complotiste, pour les livrer en pâture à des internautes friands de sordide), continueront, sans scrupule, à exhumer de quoi stopper net une ascension ou une carrière naissante, voire à ternir une réputation.
Traces et circonstances
Et là de constater le paradoxe d’internet, cet extraordinaire outil où chacun peut évoluer dans l’anonymat le plus complet pour devenir un jour peut-être une icône des réseaux sociaux. Des milliards de données souvent à l’intérêt secondaire, voire nul, qui peuvent soudainement à la faveur d’une circonstance se retrouver projetés sur le devant de la scène au point, et la jeune Mennel en a fait l’expérience, de briser les reins de son auteur. Car ce que semble avoir oublié bon nombre d’utilisateurs d’internet (y compris l’auteur de ces lignes) est qu’Internet est un gigantesque dépôt d’archives, où toutes traces numériques restent ancrées et imprimées au plus profond de serveurs informatiques lointains qui ignorent tout des contenus déposés mais qui les conserveront ad vitam. Y compris ce que certains nomment, à tort ou à raison, des erreurs de jeunesse. (Lire l’article sur liberation.fr : Mennel, une française ordinaire) Oui ! Internet à la mémoire longue. Que faire alors ? Premièrement, peut-être serait-il judicieux de rappeler que la notion de responsabilité incombe aussi aux utilisateurs du web et qu’aussi dépassée qu’elle puisse paraître, la responsabilité individuelle reste la clef de voûte de la complexité des rapports sociaux. Elle nourrit le respect d’autrui et de ses convictions. La liberté qu’offre Internet n’est qu’une liberté de façade car chacun y est surveillé et épié. Nul, derrière son écran, naviguant paisiblement sur Internet, n’est à l’abri des regards. Et chacun de nous s’y construit, volontairement ou involontairement, à coups de commentaires ou de sites fréquentés, une histoire et un passé que les circonstances de l’Histoire pourraient facilement interpréter.
Liberté d’expression ou bannissement
Ensuite et techniquement, comprendre que tout aussi libertaire que soit internet, cet outil suppose aussi d’apprendre à l’utiliser. Un jour, peut-être, pouvoirs publics et acteurs du web légiféreront sur la question pour éviter que des propos licencieux à tout le moins puissent être déposés sur la toile. La science mathématique est certainement assez avancée pour imaginer des algorithmes capables de détecter des commentaires déplacés ou susceptibles de heurter l’opinion. « Atteinte aux libertés fondamentales ! A la liberté d’expression ! Retour de l’ordre moral ! » s’écrieraient certains. A raison ? Il appartient à chacun de répondre à cette interrogation à l’aune de ses convictions mais objectivement tout propos appelant à la haine, faisant l’apologie du terrorisme ou voulant instaurer le doute sur des vérités avérées par des faits intangibles et reconnus peuvent être bannis de la toile. L’histoire d’internet ne s’écrit finalement que depuis une vingtaine d’années et les réseaux sociaux, aujourd’hui portés au pinacle du débat participatif seront peut-être dans plusieurs années rangés au rang d’avatars même si pour l’heure leur poids et leur influence, certainement surestimés, restent prégnants. Alors comme un homme averti en vaut deux…