
Le retrait de la vie politique française de nombreuses figures majeures de ces vingt dernières années illustre aussi l’incapacité de cette génération à avoir su anticiper et dominer les changements amorcés en ce début de XXème siècle. Explications.
Assisterions-nous, au cours de cette campagne présidentielle qui n’en finit pas de commencer, à un changement d’époque qui a eu raison de nombreuses figures clefs du paysage politique français ? Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Bayrou, François Hollande, Ségolène Royal, Claude Bartolone et d’autres encore certainement à venir qui annonceront dans les jours à venir leur retrait de la vie politique nationale ou locale. Bien des raisons expliquent cette vague de départ et à commencer par l’âge. Non que les cités précédemment soient atteints de sénilité, loin s’en faut tous étant encore en pleine possession physique et intellectuelle de leurs moyens, mais la politique use et les élus ou ex-élus concernés ou qui le seront dans quelques temps ont suffisamment écumé les , les ors de la République pour tirer leur révérence. Mais l’autre raison, celle qui prévaut de manière tacite, est que tous savent que leur réélection serait on ne peut plus périlleuse dans un paysage politique bouleversé. Pourquoi prendre alors le risque de se faire humilier (Nicolas Sarkozy en a fait les frais lors de la Primaire de la Droite et du Centre) quand se retirer en silence dans une forme de dignité de façade est finalement plus facile.
Courage politique
Beaucoup parleraient de lâcheté. Certes. Mais n’y a-t-il pas dans le retour à la vie commune de ces hommes et ces femmes, certains poussés par le choix des urnes convenons-en, la conscience d’être en définitive dépassé par le Monde qui est le nôtre aujourd’hui ? S’agripper au pouvoir comme la moule à son rocher n’a pas fondamentalement aidé, c’est le moins que l’on puisse dire, la démocratie de notre pays, et encore moins son tissu économique et social. Il serait pourtant aisé, voire gratuit, de dénoncer l’incapacité de cette génération, qui tourne aujourd’hui le dos à la politique, à réformer profondément et durablement le pays. Car diriger une nation, quelle qu’elle soit, n’est en rien une sinécure et n’est naturellement pas à la portée de chacun. Le courage politique qui a été le leur pendant des années, dans la majorité ou dans l’opposition, n’est pas celui de n’importe quel quidam. Briguer les plus hautes fonctions de l’Etat est certes à la portée de chacun, les assumer en est une autre. Et rares sont ceux à y parvenir et à les assumer avec efficacité et dignité. Reste encore cependant le cas François Fillon, éternel second, éternel velléitaire et qui voit tous les jours son rêve s’évaporer dans les couloirs froids et glacés du Palais de Justice. Sorti vainqueur de la Primaire car il en fallait un, François Fillon appartient lui aussi, bien qu’il s’en défende à une génération politique dépassée, usée et incapable de comprendre les mutations du Monde contemporains. Aussi, n’est-il pas inutile de s’intéresser l’espace de quelques mots à la puissance du vent de l’Histoire, celui qui balaye les poussières de l’ancien temps et fane les peintures pour ne laisser que les pierres nues.
Inertie passée
Peur de l’échec lors de l’ultime combat électoral, incapacité à répondre aux attentes d’un Monde nouveau et de ceux qui le composent, incapacité encore à affronter les défis sociaux ou économiques qui se font jour et qui ont été en partie créés par l’inertie passée, voilà autant de raisons qui poussent une large partie du personnel politique français à se retirer du jeu. Certains crieront victoire, d’autres préféreront se taire. Mais, prenons garde, la nouvelle génération, sera elle aussi un jour confrontée à l’inadéquation de ses solutions face aux exigences des temps qui viendront. Et à eux aussi, se posera la question du retrait de la vie politique. Aujourd’hui, éditorialistes et journalistes commentent avec force et acuité le départ de cette génération politique vers d’autres destinées avec le sentiment qu’elle laisse derrière elle un travail mal abouti et une tâche inachevée. La dureté des changements qui agitent l’Europe et le Monde ont été trop puissants et surtout mal anticipés par une génération encore trop ancrée dans des réflexes, des mentalités et des méthodes datant du XXème siècle. Et aujourd’hui, une question se pose : la nouvelle génération est-elle vraiment celle que le XXIème siècle exige et appelle ?