Un si lourd héritage

La Liberté
L’Histoire de la France, omniprésente dans nos modes de pensées, ne doit-elle pas perdre une partie de son influence pour que nous puissions affronter le sereinement le siècle nouveau ?

Si le prochain Président de la République sera confronté à la gestion technique d’un Etat complexe, il sera surtout dans l’obligation d’amorcer les bases d’une nouvelle réflexion articulée autour de l’appréhension du XXIème siècle. Au risque de bousculer un héritage historique devenu trop lourd.

C’est certain. Celui qui occupera pour les cinq prochaines années le palais de l’Elysée ne pourra se contenter de gérer les affaires courantes après avoir lancé pour la forme et l’image, ou les deux, quelques réformes présentées comme fondamentales pour ne pas dire révolutionnaires. Non. Celui qui entrera à l’Elysée aura la tâche de faire passer la France dans le XXIème siècle. Il n’est pas impossible d’ailleurs que ce passage s’accomplisse dans la douleur ou l’incompréhension d’un électorat qui dans l’ensemble appelle au changement mais sans réellement en mesurer les conséquences. Car, c’est aujourd’hui devenu une évidence, une lapalissade même, notre Etat providence, loué et admiré dans le monde entier, doit évoluer vers un autre mode de fonctionnement. Nous ne pouvons plus raisonner en 2017 comme nous le faisions en 1945. Certains crieront au scandale, voire à l’assassinat idéologique, modes pensées pour une grande partie issus des combats honorables et reconnus comme tels, de la Seconde Guerre mondiale et du Gouvernement provisoire.

Ridicule et dangeureux

Mais, là encore, pouvons nous nous satisfaire de systèmes dont le fonctionnement n’a guère évolué depuis leur création. Ceci ne signifie pas qu’il faille jeter le bébé avec l’eau du bain et passer sans transition à un autre mode dont nous n’avons pas encore tracé ne serait-ce que les contours. Mais pour employer une métaphore compréhensible par tous, disons que notre Etat providence est comme un enfant qui grandit et que l’on continue à habiller comme un nouveau né, juste pour conserver l’illusion de la fraîcheur et de la candeur infantile. Ridicule pour un enfant, dangereux pour un Etat comme le nôtre confronté à de lourdes mutations à venir et qui tiennent pour une large part à son incapacité à affronter la réalité en face. Et cette réalité, qu’elle est telle finalement ? Chacun a naturellement la sienne mais il est des lignes de force que chacun admettra quelle que soit son appartenance politique. Parmi celles qui sautent aux yeux, l’incapacité chronique à résoudre le chômage de masse, facteur de désespoir, d’ennui, d’isolement et de marginalisation sociale avec les conséquences que l’on peut connaître parfois. Inutile de se tourner vers le passé et les méthodes musclées et économiquement mortifères des tenants du libéralisme le plus dur, inutile non plus de s’arrêter sur celles des mouvements extrémistes pour qui l’étranger est une menace constante et inutile non plus de croire que l’Etat, déjà sollicité de toutes parts, et alourdit d’une dette qui frôle les 100% du PIB, pourra résoudre le mal français. Des solutions existent certes, jamais réellement appliquées car trop dérangeantes, non pas moralement mais matériellement. Parce que trop engoncés dans de confortables habitudes entretenues depuis des décennies, nous avons refusé jusqu’à aujourd’hui de briser ce carcan de prébendes et de privilèges, certes agréables pour ceux qui en jouissent mais pénibles pour ceux qui en souffrent. La liste est longue et les citer prendrait de nombreuses lignes.

Ruptures et utopie

Mais plus que de ruptures techniques ou administratives, nous devons apprendre à penser autrement, à générer de nouvelles formes de pensées, de nouvelles idéologies civilisatrices capables de renverser ou modifier en profondeur nos systèmes de réflexions considérés comme acquis et intangibles. Notre monde, notre pays, notre économie ressembleront à ceux que nous voulons en faire et non pas à ce que les décennies passées nous dictent de faire via une influence diffuse faite d’Histoire et d’héritages ancestraux souvent discutés mais au final révérés. Penser le XXIème siècle n’est pas une utopie sans lendemain ! C’est devenue une nécessité impérative, voire vitale, auxquels d’autres sont confrontés et à commencer par nos voisins européens. Penser l’Europe du XXIème siècle n’est pas ré-imaginer celle que les pères fondateurs avaient à l’esprit en 1957 en se gardant de toutes évolutions au prétexte que les traités fondateurs seraient trahis. A l’échelle nationale, pourquoi ne pas songer à rédiger une nouvelle Constitution défaite de la toute puissance gaullienne, pourquoi ne pas oser interroger nos institutions, voire notre République non pas en qualité de cadre législatif mais comme outil d’évolution vers demain ? Autant de questions qu’il n’est pas interdit de se poser et qui restent entières dans un monde qui n’a de cesse d’en poser à une humanité qui génère par elle-même ces mêmes questions toujours sans réponse. Alors oui, celui ou celle qui entrera à l’Elysée dans quelques jours sera dans l’obligation de gérer techniquement le pays mais aussi et surtout d’amorcer un immense courant de réflexion susceptible d’amener enfin le pays vers un vrai avenir. Sans cela prédomineront l’indécision et l’inertie, mère de biens des maux.

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