Union européenne : L’heure du choix

La crise biélorusse révèle en filigrane toutes les limites de la diplomatie de l’Union Européenne face à la Russie, soutien indéfectible d’Alexandre Loukachenko. Désormais, à l’Union de devenir une puissance et non plus un partenaire parfois écouté.

L’agitation diplomatique qui prévaut depuis quelques jours suite au détournement d’un avion de la compagnie Ryan Air par la Biélorussie au motif que celui-ci abritait un opposant au régime du président Loukachenko n’est pas sans mettre en évidence toute l’ambiguïté des Européens de l’Ouest et l’Union européenne en particulier à l’égard de la Russie. (lemonde.fr : https://www.lemonde.fr/international/article) Car si c’est bien le président Biélorusse qui a poussé au détournement de l’aéronef irlandais, il faut voir dans la hardiesse d’Alexandre Loukachenko la main invisible de Vladimir Poutine trop heureux de pouvoir, une fois encore, contrarier des Européens toujours aussi embarrassés à son endroit. Cet embarras s’explique par une situation diplomatique et économique complexe qui lie la Russie à l’Europe de l’Ouest. Diplomatique d’abord car, une fois la Guerre Froide achevée, Moscou et l’Union européenne ont commencé une politique de rapprochement qui visait à rétablir des relations longtemps distendues. Ce rapprochement s’était avéré nécessaire et a d’ailleurs quelque part permis l’intégration d’anciens pays de l’Est, pays satellites de l’URSS disparue, dans l’Union européenne. Cette intégration, que Moscou a vu comme la création d’une forme de cordon sanitaire, s’est pourtant révélée à terme problématique pour le Kremlin, surtout lors de l’intégration de la Pologne, qui mettait l’Union européenne aux portes de la Russie.

Tolérance et droits de l’Homme

Cette proximité a d’ailleurs été à l’origine de l’intervention, certes sous-jacente, de la Russie en Ukraine quelques années plus tard, soucieuse d’intégrer à son tour l’Union. Pour autant, la Russie de Vladimir Poutine ou Dmitri Medvedev s’est montrée tolérante tant que l’Union Européenne ne se mêlait pas de ses affaires internes où les atteintes aux droits de l’homme étaient légions. Cette cohabitation diplomatique concernait certes la Russie mais aussi des pays vassaux du Kremlin dont la Biélorussie qui s’accommodait fort bien d’un Occident volontairement aveugle devant les atteintes portées aux libertés individuelles et collectives, effrayé qu’il était par la susceptibilité et, malgré tout, par la puissance militaire, de l’ours russe. Economiquement car la Russie reste un partenaire au poids non négligeable. Ainsi, l’Union Européenne est-elle le partenaire économique le plus actif de la Russie (52,3 % de l’ensemble du commerce extérieur russe en 2008). En parallèle, 75 % des investissements directs à l’étranger (IDE) en Russie proviennent également de l’Union européenne. Celle-ci a ainsi exporté 105 milliards d’euros de marchandises vers la Russie en 2008 quand Moscou a exporté 173,2 milliards d’euros à l’Union européenne. Pour autant, le principal ressort des relations économiques entre l’Union européenne et la Russie reste l’exportation des hydrocarbures (gaz et pétrole) qui représentent 68,2 % des exportations russes vers l’UE. (Lesechos.fr : https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers)

Prudence et influence

La question énergétique est centrale dans cette crise diplomatique car elle oblige l’Union Européenne a beaucoup de prudence afin de ne pas froisser Moscou qui pourrait, par mesure de rétorsions mutuelles jugées trop sévères, couper l’approvisionnement en matière première. Via ces tensions, l’Union Européenne touche ainsi aux limites de son action diplomatique et de son influence géopolitique. Le noeud gordien biélorusse en illustre toute l’ampleur en dépit d’une position commune et unanime de la part des vingt-sept. Mais désormais il convient de s’interroger à Bruxelles comme dans nombre de pays membres de l’Union, sur la manière dont l’Europe politique peut peser à l’échelle européenne et continentale, comment celle-ci peut dépasser sa dépendance à la Russie pour ne plus en être tributaire, pour ne pas dire effrayée ? Finalement, il apparaît que la crise biélorusse interroge l’Union européenne sur son devenir et sa capacité à se vivre en puissance et non plus en partenaire.

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