A la tête de la coalition militaire qui a libéré la Lybie en 2011, la France peine aujourd’hui à résoudre le conflit qui y sévit. Ne pouvant que constater ses maladresses, Paris démontre aussi les limites de son influence diplomatique et confirme son statut de puissance mondiale moyenne.
Lorsque Nicolas Sarkozy, alors président de la République, et David Cameron, Premier ministre anglais, décidaient et engageaient en 2011 une intervention militaire commune en Libye pour libérer le pays de l’emprise du Colonel Kadhafi (pourtant reçu avec tous les honneurs républicains à Paris en 2007), rares étaient ceux qui imaginaient l’état de déliquescence dans lequel le pays basculerait une fois l’intervention achevée et le Colonel Kadhafi disparu. Par cette intervention à peu de frais, l’armée libyenne étant alors aussi mal équipée que préparée, la France et son président en perte de vitesse dans l’opinion à un an du scrutin électoral de 2012, voyait là l’opportunité de se poser en figures incontournables de la diplomatie méditerranéenne.
Paix et crédibilité
Pourtant, force est de constater que huit ans plus tard, après moult sommets devant sceller la paix entre les deux principales factions libyennes (ndlr : L’Armée Nationale libyenne du Maréchal Haftar et l’Armée du Gouvernement d’union nationale actuellement à la tête du pays), dont l’une a opéré le 11 avril une foudroyante avancée sur Tripoli, à savoir celle du Maréchal Haftar, que rien ne semble orienter le pays vers la paix, au grand dam des populations civiles, prises dans l’étau de la guerre. (Lire l’article sur rfi.fr : http://www.rfi.fr/afrique/20190411-libye-civils-pris-etau-combats-tripoli ) Et que dire de l’image diplomatique de la France, qui a perdu via cette crise, un peu plus de crédibilité à l’échelle internationale en dépit des efforts de médiation que celle-ci a déployé et qu’elle continue à déployer. Proche du Général Haftar qu’elle soutient sans le dire et dont l’offensive sur Tripoli compromet le processus de paix, Paris voit sa position controversée, incapable de présenter officiellement une ligne claire au regard du conflit entre les deux factions, ravivant aussi les tensions sur le dossier avec son partenaire italien. (Lire l’article sur lemonde.fr : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/04/12/la-france-critiquee-pour-son-role-ambigu-dans-le-dossier-libyen_5449212_3212.html) Car il convient de ne pas s’y tromper, c’est bien la France qui est l’un des premiers responsable du chaos qui prévaut aujourd’hui en Lybie.
Chute et désarroi
Certes l’emprise qu’opérait le Colonel Kadhafi sur le pays a motivé sa chute et il était devenu nécessaire que cet homme, aussi cruel que cynique, disparaisse de la scène politique libyenne mais devant le désarroi des populations, la faiblesse structurelle du pays et la guerre civile qui ravage la Cyrénaïque, il apparaît combien l’opération militaire a été menée avec une forme de désinvolture dénuée de toute anticipation susceptible imaginer l’ère post-Kadhafi. La France, toujours prompte à dispenser des leçons d’humanité et d’humanisme aux autres nations a ainsi péché par orgueil avec l’idée que l’intervention menée lui permettrait de redorer son blason de puissance mondiale tout en imaginant, comme le pensa au début des années deux mille Georges W. Bush, l’ancien président des Etats-Unis, que l’on pouvait sans mal exporter la démocratie. Au final, et dans l’indifférence presque totale, la Lybie continue à se déchirer, et continuera jusqu’à ce que l’une des deux factions écrase sa rivale, Paris ayant quant à elle misé sur le Général Haftar. Or cette dernière a prouvé via cet imbroglio diplomatique dans laquelle elle apparaît en première ligne, qu’elle restait une puissance moyenne, aux capacités diplomatiques limitées et incapables de gérer les conséquences de ces actions y compris dans son périmètre direct d’intervention diplomatique.