La guerre idéologique opposant ligne dure et ligne modérée au sein des Républicains s’est cristallisée sur le premier ministre hongrois Viktor Orban. Persona non grata pour certains, fréquentable pour d’autres, l’homme met en exergue les porosités idéologiques anciennes entre droite et extrême droite.
Si la gauche et la droite françaises ont été divisées par la candidature puis l’élection d’Emmanuel Macron, avec toutes les difficultés de reconstruction que l’une et l’autre connaissent aujourd’hui, il semble pourtant que la droite soit plus encore embarrassée par le cas Viktor Orban. Ce même homme, premier ministre de Hongrie, et qui avait fait ici l’objet de quelques lignes il y a quelques jours, est devenu, à son corps défendant (mais sans cacher sa satisfaction non plus) le centre de débats violents et échevelés au sein des Républicains. Laurent Wauquiez, président du mouvement, en vu des élections européennes de mars 2019, ne fait pas mystère de certaines proximités idéologiques avec l’homme politique hongrois, qui, rappelons-le, est membre du PPE (Parti Populaire européen au sein du Parlement européen de Bruxelles) Ce même Laurent Wauquiez s’est même fendu d’une certaine défiance à l’endroit de l’activation de l’article 7 des Traités européens suite au bafouement de l’Etat de Droit par Viktor Orban. (Lire l’article dans lemonde.fr : Les Républicains s’écharpent sur le cas du premier ministre hongrois populiste Viktor Orban )
Opportunisme et ambitions
La position du président de Les Républicains certes pleine d’opportunisme mais aussi de porosité idéologique entre la droite française et les franges extrêmes des mouvements conservateurs européens n’est pas nouvelle. Lionel Jospin l’avait déjà dénoncée en 1997 à l’occasion des élections législatives anticipées organisées au lendemain de la dissolution de l’Assemblée Nationale par Jacques Chirac. Car c’est bien de porosité, voire de collusion idéologique qu’il s’agit en l’occurrence et que Laurent Wauquiez ne prend plus nécessairement la peine de dissimuler quand Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, plaide elle pour une clarification de la position de son parti et un éloignement des thèses défendues par Viktor Orban.Valérie Pécresse, qui nourrit de vraies ambitions politiques à l’échelle nationale, tout comme Laurent Wauquiez, sait qu’une alliance, même objective, avec Viktor Orban pourrait discréditer un parti qui se veut défenseur de l’Etat de droit et républicain. Laurent Wauquiez, quant à lui, se prend à imaginer qu’un rapprochement, quel qu’il soit, pourrait potentiellement être bénéfique, entendant ainsi à demi-mot profiter de la vague populiste traversant actuellement l’Europe et dont il compte utiliser la dynamique pour réaliser un score honorable lors du scrutin européen, score qui légitimerait sa position discutée à ce jour au sommet des Républicains. (Lire l’article sur lejdd.fr :Les Républicains se déchirent sur le cas du Hongrois Viktor Orban )
Regard et facilité
Deux batailles tendent alors à se dessiner à ce jour : une opposant Valérie Pécresse et Laurent Wauquiez ; la seconde celle qui oppose les partisans d’un ralliement au mouvement populiste européen, soit par opportunisme, soit pas conviction, voire les deux. La droite française, qui a toujours eu du mal à détacher son regard des extrêmes, est encore une fois tentée par la facilité d’un populisme électoralement porteur mais inconciliable avec les idéaux démocratiques portés par l’Union européenne. Eternel dilemme que celui qui agite la droite française et que l’historien René Rémond avait qualifiée de plurielle dans son ouvrage Les droites françaises. Reste désormais à savoir quelle ligne politique l’emportera : celle de Valérie Pécresse ou de Laurent Wauquiez. Ce qui est en revanche certains à ce jour c’est que toute alliance avec une formation populiste, fut-elle d’extrême gauche ou d’extrême droite, sera assimilée à une prise de risque capable de jeter Les Républicains dans une crise interne plus lourde et fratricide que celle actuellement vécue.