Leçon de cynisme à la russe

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Vladimir Poutine a su exploiter l’inertie des Occidentaux et instrumentaliser l’Etat islamique pour faire de la Russie un acteur incontournable de la résolution du conflit.

La reprise de Palmyre par les forces de l’Etat islamique pourrait permettre à Vladimir Poutine de conforter son statut d’interlocuteur unique dans la résolution du conflit syrien. Comment ?  En usant de la lâcheté des Occidentaux et en instrumentalisant l’Etat islamique à son profit via la peur que celui-ci véhicule.

Dire que la diplomatie russe, et derrière elle Vladimir Poutine, fait preuve d’un cynisme paroxystique serait un euphémisme que d’aucuns, spécialistes ou non de la question syrienne, pourrait constater sans prendre le risque de se tromper. Mais ce cynisme, dont le régime de Bachar El Assad use et abuse, en pilonnant sans cesse, et dans l’indifférence générale, Alep est aussi lié à la reprise de Palmyre par l’Etat islamique. (voir l’article sur lemonde.fr : Syrie : l’organisation Etat islamique a repris le contrôle de Palmyre ) Une explication s’impose. Vladimir Poutine sait combien la puissance militaire et diplomatique de la Russie le protège de toute intervention armée qui pourrait être menée contre lui par les puissances occidentales, l’homme fort du Kremlin en profite donc pour agir à sa guise à Alep et ainsi conforter localement ses positions. Parallèlement, Vladimir Poutine sait combien la reprise de Palmyre par les forces de l’Etat islamique ne manquera pas de provoquer émotions et réactions dans le monde occidental, celui-ci considérant la ville antique comme un lieu de mémoire, préférant oublier au passage le martyre enduré par Alep. Aussi, une fois Alep définitivement rentré dans le giron du régime syrien par la force et le sang, les forces russes et gouvernementales syriennes, se tourneront à nouveau vers Palmyre, même si ces dernières ne l’avaient jamais réellement oubliée.

Instrument et obstacle

Pour autant, une réalité s’impose : devant l’inertie des puissances occidentales et notamment le renoncement de Barack Obama en août 2013 de ne pas intervenir en Syrie, Vladimir Poutine est devenu un acteur incontournable de la crise syrienne.  (voir l’article sur lemonde.fr :Syrie : « Les Etats-Unis ont laissé le champ libre à la Russie, devenue incontournable » ) Choisissant ses priorités comme bon lui semble, soutenant selon son bon vouloir, et dans la mesure qui lui convient, le régime syrien. A ce jour, la Russie est devenue l’arbitre du conflit, glissant avec aisance et sans le moindre scrupule sur la lâcheté occidentale et l’impasse diplomatique dans laquelle Europe et Etats-Unis se sont enlisés ainsi que sur les ambitions de Bachar El Assad. Et l’Etat islamique dans tout cela ? Annoncée agonisante, repoussée dans ses derniers retranchements, celle-ci prouve cependant qu’elle est encore suffisamment active et dangereuse pour poursuivre son combat. Mais sans le savoir, et sur le territoire syrien en tous cas, l’Etat islamique est devenue l’instrument de Vladimir Poutine. Une précision s’impose. Il est clair et évident que la puissance militaire russe aura raison de l’Etat Islamique, l’organisation terroriste aussi bien armée soit-elle ne pourra naturellement jamais rivaliser avec l’armée russe. Mais pour avoir plus encore les mains libres vis-à-vis des Occidentaux, Poutine n’hésitera pas à jouer de l’Etat islamique et de sa progression en se posant comme le seul obstacle crédible à l’organisation terroriste.

Blanc-seing

Dans un raisonnement simple et une logique quasi-machiavélique, Vladimir Poutine profite sans fard de la lâcheté occidentale pour se poser en unique recours local, l’homme ayant compris que les puissances occidentales lui accorderaient tacitement ou officiellement un blanc-seing pour se débarrasser coûte que coûte de l’Etat Islamique. Ces mêmes puissances soucieuses de préserver leurs sols de toutes nouvelles attaques terroristes, seront prêtes à tout accepter de Vladimir Poutine (la position d’allégeance de François Fillon à l’endroit de ce dernier le prouvant aisément), quitte à sacrifier Alep, voire Palmyre si la situation l’exigeait. In fine, mis au banc des accusés pour soutenir Bachar El Assad, Vladimir Poutine pourrait être devenu l’homme de la situation en syrienne, non pas en raison de talents diplomatiques extraordinaires mais parce qu’il a su exploiter avec intelligence les faiblesses occidentales vis à vis de Bachar El Assad et leurs peurs du terrorisme. C’est ce que l’on appelle du cynisme : froid, pragmatique, amoral et dénué de toutes émotions.

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