L’Algérie à l’heure de son histoire

Alors que grossissent les cortèges de manifestants refusant la nouvelle candidature du président Bouteflika à l’élection présidentielle, l’Algérie amorce un tournant décisif de son histoire : l’âge de l’émancipation.

Et si l’Algérie entamait enfin son printemps arabe ? Devant l’ampleur de la contestation liée à la volonté du président Abdelaziz Bouteflika, un homme de 82 ans malade, de se représenter à un cinquième mandat (l’ancien membre de l’Armée de libération nationale (ALN) a été élu pour la première fois en 1999), pourquoi ne pas imaginer que ce géant du monde arabe, qui possède tous les atouts (Ressources naturelles, démographie, exposition géographique,…) pour devenir une grande puissance, se libère des chaînes de l’armée qui l’étreignent depuis 1962  sous couvert d’une République démocratique qui n’en porte que le nom ? (Lire l’article sur le figaro.fr : http://www.lefigaro.fr/international/2019/03/02/). L’occasion se présenterait-elle enfin pour ce pays, riche d’une manne pétrolière mal exploitée et rongé par une corruption endémique, qui avait vu ses voisins tunisiens, lybiens et syriens s’émanciper respectivement de l’autorité de Zine el-Abidine Ben Ali, Muammar Khadafi et Hosni Mubarak en 2011 ?

Lassitude et intérêt général

En réalité, tout semble y concourir. La lassitude du peuple algérien, notamment sa jeunesse largement majoritaire (45% de la population totale, soit 42,2 millions d’Algériens, est âgée de moins de 25 ans ; 22,5% de moins de 30 ans)*, pressée d’expédier l’héritage des pères de la révolution de Houari Boumédiène à Ahmed Ben Bella en passant par
Abdelaziz Bouteflika, la volonté de ce dernier d’extraire le pays d’un immobilisme sclérosant où se disputent affairistes et hommes politiques souvent plus soucieux de leurs intérêts particuliers que de l’intérêt général et enfin la nécessité pour l’Algérie de rentrer de plain pied dans le XXIème siècle en se débarrassant de cette image de nation post-coloniale incapable de grandir sans l’aide d’un quelconque allié attiré par les ressources naturelles du pays. Et la contestation d’attester de cette volonté de changement. Mais étrangement, alors que le peuple algérien refuse de voir le président Bouteflika se présenter à nouveau, l’opposition reste silencieuse, incapable de présenter une solution alternative. (Lire l’article sur lemonde.fr : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/03/02/) Or, et l’Histoire l’a maintes fois prouvé, tout mouvement populaire mal appréhendé et mal contrôlé peut donner lieu à des débordements ou des dérives à l’ampleur inconnus. L’Algérie, qui a longuement pansé les plaies de la guerre d’indépendance et de la guerre civile, est désormais prête à se tourner vers une démocratie digne de ce nom où son peuple, longtemps infantilisé et tenu sous perfusion grâce aux recettes pétrolières qui ne faisaient que cacher grossièrement une réalité sociale et économique devenue insupportable, semble vouloir clairement en finir avec son régime politique actuel pour enfin se nourrir de libertés fondamentales comme la liberté d’expression ou de la presse.

Maturité et privilèges

Or, au regard des premières manifestations, des slogans lancés, de la volonté de manifestants de n’être en aucun cas récupérés et de s’inscrire dans une logique pacifiste, il apparaît combien ce mouvement laisse exhaler une maturité et une densité que le régime actuel doit désormais plus que redouter. Rappelons-le, la population algérienne, jeune et cultivée, en dépit d’un système éducatif à bout de souffle, s’est nourrie des erreurs commises et de l’expérience des générations passées. Mais au-delà de cette jeunesse, c’est, semble-t-il, toute la société algérienne qui fait valoir son exaspération incarnée par le refus de voir le président Bouteflika se présenter à nouveau. Car pourquoi se représenterait-il si ce n’est pour assurer la survie d’un édifice politique, social et économique chancelant et dépassé où prébendes et privilèges ont pris le pas sur la collectivité. D’aucuns, au sens de la formule plus ou moins aiguisé, affirmeraient que l’Histoire est en marche. Pourtant, si celle-ci ne s’arrête jamais, elle aime à faire sentir son pouls par des à-coups parfois plus violents que d’autres, en témoignent les manifestations et cet embryon de révolution qui se fait jour dans les rues d’Alger. L’heure est venue !

  • Sources : Algérie Presse Service – Population au 1er janvier 2018.

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