Le risque de la victoire

Elections
La République en Marche, annoncée comme victorieuse, s’expose au danger d’une omnipotence non désirée et sclérosante pour les partis historiques.

Annoncée comme vainqueur du scrutin législatif, La République en Marche risque en cas de majorité absolue de confisquer sans le vouloir le débat démocratique au sein de l’Assemblée en écartant les partis historiques en sclérosant toute opposition.

Caracolant dans les intentions de vote, les candidats de la République en Marche, le parti du président Macron, peut aborder le premier tour des élections législatives (11 et 18 juin) pour le moins serein. Et il est à parier que le parti en question obtienne la majorité absolue au terme du second tour du scrutin. Bonne nouvelle pour les partisans du nouveau président mais qui pourrait finalement s’avérer plus ennuyeuse que réellement positive. Pourquoi ? Une explication s’impose. Emmanuel Macron qui défend, et s’est fait élire, sur l’explosion des clivages politiques, va vraisemblablement pouvoir compter sur une majorité écrasante de députés issus de tous les bords de l’échiquier politique (à l’exception du Front National), majorité qui écartera de fait les partis historiques non pas du débat mais de toutes possibilités de peser sur le débat en question. Celui qui voulait recomposer le paysage politique et parlementaire en générant une forme de syncrétisme idéologique risque d’étouffer toute forme de débat clivant au sein de même de l’assemblée.

Assemblée toute-puissante

L’histoire a déjà prouvé combien une majorité surpuissante et écrasante était capable de nuire au débat en imposant une seule et unique voix au sein de l’Hémicycle, asphyxiant par là même celles et ceux qui représentaient un autre courant politique. Ainsi, en 1993, la droite emmenée par Jacques Chirac avait-elle raflé la majorité des sièges au Parlement au point que devenue obsédante et surpuissante, le nouveau président élu en 1995 avait décidé, deux ans plus tard, de dissoudre l’Assemblée avec les conséquences que l’on sait. Rien ne dit qu’Emmanuel Macron sera confronté à une situation identique mais une majorité trop lourde pourrait donner le sentiment d’exclure les autres partis et donc d’écarter des citoyens soucieux et à raison (c’est le principe de la démocratie) de faire valoir leur voix par les députés élus. Le risque encouru est finalement celui d’aboutir à un Etat aux ordres de la République en Marche, sans que le Président de la République l’ait voulu, dépassé qu’il est aujourd’hui par le succès de son projet devenu en partie réalité. Car l’absence d’opposition crédible, forte et capable d’interroger le Gouvernement ou la majorité sur le sens de son action est préjudiciable à la démocratie où seule s’impose alors un seul point de vue, ce qui au regard de la pluralité républicaine n’est pas sans poser de problèmes moraux. Est-ce à dire que la République en Marche doit perdre les élections législatives ? Il n’est pas nécessaire de tomber dans l’excès inverses mais il serait peut-être salutaire pour la démocratie que l’Assemblée Nationale accueille toutes les sensibilités politiques que les électeurs veulent y voir siéger. Emmanuel Macron sait qu’une majorité absolue, certes efficace et dévouée, peut aussi être perçue comme sclérosante, facteur d’impossible et de verrouillage pour des Français en quête de changement et non pas d’omnipotence repeinte et aux couleurs de La République en Marche.

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