
En se présentant comme candidat à l’élection présidentielle via son ouvrage Tout pour la France, Nicolas Sarkozy lève un secret de Polichinelle. Mais que cache vraiment cette candidature : un vrai projet politique ou un honneur blessé à réparer ?
Il est donc candidat. Secret de Polichinelle qui a parcouru depuis mai 2012 les rangs de toute la classe politique française. Donc point de surprise à cela. Mais si être candidat est une chose, être élu en est une autre. Et à ce jour Nicolas Sarkozy prépare le terrain et se répand de discours radicaux en diatribes quasi-incendiaires sur les menaces potentielles que l’Islam fait peser sur la France et plus largement l’Europe. L’ancien chef de l’Etat, conscient que son élection ne se jouera jamais à gauche ou au centre gauche, va donc chasser sur les terres du Front National, conscient à nouveau et selon ses propres termes que « Marine Le Pen a touché son plafond de verre. » Il ne lui reste donc qu’à rafler la mise de ces électeurs tombés dans l’escarcelle de l’extrémisme droitier. La tactique n’est pas nouvelle, le discours non plus à part qu’il est singulièrement plus dur que par le passé. Peu importe d’ailleurs pour Nicolas Sarkozy qui votera pour lui. Si la surenchère démagogique et extrémiste peu servir : Et bien soit qu’elle serve ! Et au diable les principes, les approximations ou les amalgames fumeux sur le burkini ! Ceci en dit long sur les motivations de Nicolas Sarkozy à vouloir reconquérir l’Elysée. Lui évoque une gauche tétanisée face au terrorisme, incapable de prendre à bras le corps le problème islamiste (et passons sur l’incapacité économique vilipendée). Il est vrai que les thèmes de campagne pour discréditer François Hollande et son action se réduisent. La question économique, précisément celle de l’emploi (voir article sur lesechos.fr : Le chômage repart à la baisse en juillet ) loin d’être naturellement réglée loin s’en faut, n’est peut-être plus la question centrale même si elle pèse et pèsera encore très lourd dans le débat à venir.
Défaite et humiliation
Alors Nicolas Sarkozy s’est saisi de la question de l’identité nationale, histoire de montrer qu’il est un homme de droite, convaincu que l’ordre et la sanction sont les seules solutions aux questions terroristes actuelles. C’est un parti pris auquel il croit mais un parti pris qui vaut outil de campagne comme a valu outil le « travailler plus pour gagner plus » ou la croisade anti 35 heures,….Car tout ces thèmes de campagne ne sont en définitive que des prétextes, sous couvert de programme politique et présidentiel, appuyé par un livre Tout pour la France, qui cachent une réalité tout autre et qui renvoie l’ancien président au soir de sa défaite électorale en mai 2012. Vécue comme un affront et une humiliation, cette défaite n’a jamais été acceptée ou digérée par Nicolas Sarkozy. Pétri d’un ego sur-dimensionné que même ses plus fidèles lieutenants ont dénoncé et parmi eux Xavier Bertrand (voir article sur le huffingtonpost.fr : Xavier Bertrand sur Nicolas Sarkozy: « qui est-ce qu’il aime, à part lui? »), l’ancien président de la République n’a jamais supporté d’avoir été évincé du pouvoir, lui qui se considérait comme l’élu et l’Elu. Qui plus est battu par un adversaire jugé inoffensif comme François Hollande qui piétinait à hauteur de 3% d’intentions de vote en janvier 2011. Cet affront, en tous cas considéré comme tel, doit, pour Nicolas Sarkozy, être lavé et conjuré par une autre victoire à l’élection présidentielle. L’ancien chef de l’Etat donne ainsi le sentiment d’être le seul à pouvoir incarner et user du pouvoir, que tout autre ne serait qu’un imposteur. Il est certain que l’homme entend mettre en pratique ses convictions. Mais il sait aussi que l’exercice du pouvoir exige compromis et renoncements et que tout programme ne peut être pleinement accompli.
Remplir les urnes
La tentative de séduction et de ralliement des électeurs du Front National n’a que pour seule vocation de remplir les urnes, ce qui n’empêche pas Nicolas Sarkozy de vouloir réformer le droit du sol ou le regroupement familial et de tout faire, arrivé à l’Elysée, pour y parvenir. D’abord parce que convaincu d’avoir raison, enseuite parce que tenu électoralement et politiquement. Pour autant, ouvrons une parenthèse, la digression de Nicolas Sarkozy sur le droit du sol et le regroupement familial n’est en rien la solution pour endiguer le terrorisme : les événements l’ont prouvé puisque les terroristes incriminés étaient soit français, soit résidents réguliers, soit issus de l’Union européenne. Il s’agit donc d’un terrorisme endogène et non exogène généré par de multiples facteurs sociaux et intellectuels, loin des ressorts du regroupement familial ou du droit du sol. Reste donc à savoir où se dissimule la part de sincérité politique dans son discours, dans quelle mesure se dispute-t-elle avec sa volonté de revanche et un égocentrisme démesuré ? Car la ficelle est grosse, vraiment grosse. Qui l’avalera ?