Le pardon ne suffira pas

La confession ne pourra plus servir de rempart à l’Eglise pour se protéger des souffrances des victimes.

La publication du rapport Sauvé impose à l’Église catholique de France plus que la reconnaissance des abus sexuels commis pendant des décennies. Une réforme complète de l’institution, de son rôle et de ses objectifs est désormais impérative.

Il est peut de dire que la publication du rapport Sauvé révélant les abus sexuels commis par des religieux ou des prêtres religieux catholiques en France entre 1950 et 2020 a causé une véritable déflagration tant au sein de l’Église catholique qu’au sein de la société civile. (huffingtonpost.fr : https://www.huffingtonpost.fr/entry/) Déflagration tout d’abord en raison de l’ampleur du nombre d’abus et des conséquences juridiques et judiciaires qui en découleront. Mais déflagration aussi peut-être, et surtout, sans naturellement minimiser ou reléguer au second rang la gravité des abus et des violences commis, en raison des changements auxquels l’institution catholique devra, bien qu’elle fasse preuve pour l’heure de réticence en la matière, engager. Ce changement passera, d’aucuns l’auront compris, par une refonte totale des instances dirigeantes de l’Église de France, sans épargner le Vatican, qui, silencieux pendant des décennies, a de fait cautionné ces agissements, mais aussi par un aggiornamento des objectifs, du rôle de l’Église et de ces serviteurs.

Troisième ordre et sélection drastique

Le chantier qui s’ouvre devant l’institution, trop longtemps engoncée dans l’idée que son histoire lui conférait encore le rôle tacite de troisième ordre (ndlr : allusion faite aux trois ordres qui prévalaient avant la Révolution française, le Clergé, la Noblesse et le Tiers état), est gigantesque car à même de bousculer son seulement la hiérarchie catholique mais plus encore le rapport que celle-ci entretenait avec les fidèles. La pédocriminalité qui a ainsi prévalu au sein de l’Église catholique de France a donc jeté l’opprobre sur une institution que l’on pouvait croire sans tâche mais qui devra désormais composer avec la honte et la culpabilité qu’elle n’hésitait pas à imposer à ses fidèles. Trop déconnectée de la société contemporaine, en dépit d’une sécularisation de façade, l’Église catholique a désormais le devoir se se plier à une sélection des plus drastiques de ses serviteurs. Ouvrir le mariage aux prêtres peut apparaître comme une première étape mais celle-ci répond plus à une modification du dogme qu’à une réelle nécessité sociale. Certainement plus que toute autre institution amenée à côtoyer du public, a fortiori jeune, fragile et influençable, d’où le silence qui a régné sur la question pendant des années, l’Église doit engager une vraie politique de recrutement et se muer en Directeur des Ressources humaines afin de choisir les bons candidats , laïcs ou religieux. Souvent prompte à se réfugier derrière le secret de la confession, arguant de son aspect sacré et divin, imposant de fait la primauté du droit canon sur le droit civil, de la justice de Dieu sur la justice des Hommes, l’Église a volontairement niée les évolutions culturelles, sociales et politiques de la société qu’elle était sensée spirituellement, et rien d’autre, servir. (lemonde.fr : https://www.lemonde.fr/societe/article/)

Conviction et péchés

En bafouant l’intégrité de jeunes enfants, filles ou garçons, elle salit et traumatise simultanément l’individu amené par choix personnel vers la foi par conviction qui n’y trouve in fine que honte et culpabilité. Le message subliminal de l’Église où se tutoient écoute et pardon a ainsi été détourné, pour ne pas dire dévoyé, non pas au profit du croyant mais au profit de l’institution qui s’est trop longtemps appuyée sur le silence de ses victimes, trop effrayée pour dénoncer les abus, pour laisser ses prêtres et laïcs agir en toute impunité. Enfin, il n’est pas inopportun de s’interroger sur le poids des évolutions sociétales de ces dernières années, véhiculées et parfois amplifiées par les réseaux sociaux, tels que le mouvement MeToo, qui visaient à briser la chape de plomb qui protégeaient certaines pratiques désormais dénoncées et punies. Dès lors un constant s’impose : l’Église de France a péché par excès de confiance dans sa position de prétendue autorité morale à même de masquer les abus commis et dénoncés, par manque de réactivité de ses dirigeants trop occupés à défendre l’image de l’institution tout en étant conscients et informés des abus perpétrés et par incapacité, ou manque de volonté, de réformer une institution dépassée et loin d’être en phase avec la société dans laquelle elle veut s’inscrire.

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